2. Aéroport Charles de Gaulle, Terminal 1
Sur ma page 2:
Votre biographie
contre un billet d'avion.
Prière
de bien vouloir me prendre aux mots!
Des heures et des heures tombent. J'attends debout.
Beaucoup de sourires.
Beaucoup me regardent sans me voir.
Quelques yeux de mépris aussi:
Petits monceaux d'humanité en vacances prolongées,
bêtise contemporaine d'une hauteur inimitable..
Pendant leurs pauses, des employés de l'aéroport m'interrogent.
Ici par compassion, et là par sympathie.
Pour les mêmes raisons je réponds.
Quelqu'un soudain me prête espoir:
Madame à un billet pour Londres en trop. Ni échangeable, ni remboursable.
Il m'est proposé gracieusement et sans contrepartie. Mais il y a un nom dessus.
Un autre nom que le mien.
Je ne suis pas collectionneur et délaisse l'appropriation d'un billet à usage perdu.
On me parle et me parle. Encore on me questionne.
Tant et tant de curieux en mal d'un voyeurisme enthousiaste et bavard.
Je ne sais ou je vais. Et à tous ceux qui me demandent je leurs réponds que je pars.
Je pars, et je suivrais le vol qu'il leur plaira.
13h00.
« On » me fait porter un sandwich.
Je remercie le serveur sans n'avoir vu mon bienfaiteur.
Après manger, le décollage se fait plus proche.
“Bonjour!”
Elle parle un français presque sans accent.
« J'ai Bangkok, ou Vientiane, mon vol a une escale ».
Je regarde mon annonce papier.
Rien n'y étant précisé, elle seule peut décider l'itinéraire de sa biographie.
Elle sourit.
« Où sont vos bagages?»
Je lui montre mon stylo.
Elle s'arrête de sourire.
En hochant les épaules, je lui montre mon seul leste, un petit stock de papier.
Elle rit un peu. Un peu forcé je pense.
« Vous avez un passeport? »
Je lui montre mon passeport.
Gagné!
Je l'accompagne au guichet de la Thai Airways pour faire changer son deuxième billet à mon nom.
« Vientiane? »
« D 'accord. »
Je m'enquiers du temps de vol.
18h00.
« Je m'appelle *** , ravi d'être votre biographe ».
« Iona, enchantée. »
Elle sourit de nouveau, me serre la main, et puis s'incline poliment tendant son autre main vers le hall de l'aéroport à la façon d'un maître d'hôtel asiatique.
Du plus profond de mon sincère merci j'accepte son invitation.
De son côté, l'hôtesse ne nous témoigne qu'un très joli regard blasé.